Les mouches sont un vrai problème dont on ne parle pas assez et il faut toutes les exterminer jusqu’à la dernière
L’été est une saison que les Greusotins attendent toujours avec beaucoup d’impatience. C’est le moment où l’on sort les chaises longues et les barbecues, pour enfin investir la terrasse, et profiter des chaudes journées ensoleillées et des moments conviviaux entre amis. Pourtant l’été possède aussi une part sombre et amère, dont la plupart des Greusotins ont pu faire la traumatisante expérience… mais on n’entend curieusement pas beaucoup les grands médias à ce sujet.
Un Greusotin ayant souhaité resté anonyme nous a rapporté l’effroyable histoire suivante : alors qu’il s’était à peine installé à table avec sa femme et ses enfants, des nuées de mouches sont venues s’abattre sur eux. Mû par un instinct bien naturel de protection de sa famille, Guy n’a pas hésité longtemps : il a saisi une bombe aérosol et en a copieusement aspergé l’escadron infernal. Monsieur Boucherey avait cependant négligé un détail crucial : l’absence de vent. Aussi, ce furent tous les plats qui se retrouvèrent assaisonné du liquide pesticide, tandis que la famille suffoquait dans les miasmes. Les enfants toussaient et pleuraient. Le repas, à peine commencé, se terminait déjà dans les larmes et les cris. Tragédie de la vie quotidienne d’une famille ordinaire, que la presse locale se gardera bien de rapporter.
Thérèse, une amie de la rédaction du Greusot-Infos, a témoigné qu’elle avait déboursé plus d’une centaine d’euros à son coiffeur pour se faire une nouvelle permanente. Las, une fois rentrée chez elle, elle se prenait les cheveux dans un papier collant tue-mouche et tout était à refaire. Dommage collatéral d’une guerre qui ne dit pas son nom. Elle était écoeurée.
Votre serviteur lui-même, harassé par une longue journée de besogne, n’a pas pu profiter du repos nocturne qui lui était dû : les bourdonnements ininterrompus d’un diptère idiot l’ont empêché de trouver le sommeil. Et c’est qu’il volait vite et évitait adroitement la charentaise, le fourbe !
Nous n’avons pas peur de le dire : les attaques organisées des mouches se font chaque année de plus en plus insupportables, de plus en plus agressives. Elles ont sagement patienté l’hiver, attendant leur heure… et à la belle saison, assoiffées de sucre et de chaos, elles ressortent en masse pour frapper aveuglement et au hasard nos citoyens désemparés.
Cette insupportable violence ne cessera que lorsque nous nous serons donnés les vrais moyens d’y mettre fin. Il faut agir vite et fort pour définitivement détruire la menace. Éliminer le parasite une bonne fois pour toute, d’une poigne ferme et virile. Aucune demi-mesure ne sera satisfaisante.
Le plus étonnant dans cette situation, c’est le paradoxal silence des médias. Eux toujours si prompts à faire pleurer les chaumières avec la photo d’un ours polaire s’agrippant à un bout de banquise, les voilà complètement muets face à la souffrance de leurs concitoyens. A propos des mouches, ils ne piperont pas un mot. Les Greusotins n’ont qu’à la fermer !
Nous le savons, les écolos et autres militants intégristes de la cause animale sont partout, à la radio et à la TV. Peut-être même sont-ils tout près de vous, insidieusement cachés parmi vos proches. Avez-vous pensé à interroger votre copain Roger, qui a refusé de prendre du bœuf bourguignon lors du dernier repas, sous prétexte qu’il « n’avait pas faim » ? Et Julie, votre petite dernière, qui a poussé un long soupir exaspéré et fait mine de se plonger dans son smartphone alors que vous lui expliquiez pourquoi la peur du réchauffement climatique ne devait pas brider la croissance économique ? Soyez vigilants et détectez les premiers signes de radicalisation.
Face à la multiplication exponentielle des attaques insectoïdes sur notre territoire, nous avons d’abord une pensée pour ceux qui en souffrent le plus. Les éboueurs, gênés dans l’exercice de leur métier(1). Les animaux de la ferme : vaches, cochons, moutons et chèvres, terrorisés à la perspective d’être livrés à eux-mêmes face aux nuées grouillantes. Les pâtisseries que personne ne mangera : souillées par les six pattes d’un insecte s’étant effrontément posé dessus, elles finiront directement à la poubelle.
Nous avons aussi une pensée pour les ménagères, forcées de nettoyer les amoncellements de cadavres de mouches mortes devant les fenêtres et qui en auront un frisson de dégoût.
Mais les défenseurs de la cause animale ne s’intéressent pas à la douleur des victimes. Ils n’ont que faire de tous ces barbecues d’été gâchés, de ces moments en famille irrémédiablement brisés. Enfermés dans leur tour d’ivoire parisienne, déconnectés qu’ils sont de la réalité de nos campagnes, ils vous répondront que les mouches sont utiles. Qu’elles font ce pour quoi la Nature les a faites. Qu’elles servent à nourrir les oiseaux. Qu’elles ne représentent pas tant que cela un vrai désagrément. Qu’on peut les supporter, voire (comble de la naïveté) apprendre à faire avec. « Vous n’avez qu’à fermer vos fenêtres et rester à l’intérieur de votre maison », disent-ils. C’est alors toute la chaîne alimentaire qui est retournée : l’insecte, maillon le plus basique destiné à servir de proie, se transforme en un roi intouchable placé au sommet de la pyramide.
Mais les mouches, elles, ne connaissent pas de frontières. Soyez sûrs, mes chers écolos, qu’après avoir ravagés nos belles campagnes de Saône-et-Loire, les mouches viendront s’en prendre à vous, en allant investir vos coquets appartements citadins. Et lorsque vous entendrez le bruit sourd de la mouche égarée qui cogne à répétition contre la fenêtre, ou lorsque que vous serez dérangés en plein repas par des insectes se posant sur le rebord de votre assiette, il sera bien trop tard. Vous n’aurez plus que vos yeux pour pleurer.
Avant que les choses ne deviennent irréversible, il est temps d’abandonner cette folle idéologie d’une nature douce et bienveillante, et de retrouver notre bon sens paysan. Celui de nos anciens qui, dans les années 60, ont copieusement arrosé la Camargue de DDT pour la libérer du joug des moustiques. Celui de nos agriculteurs, savants gardiens de la Terre, qui ont bien compris que le seul bon arthropode est celui que l’on a mis au pas (si possible après une généreuse administration de neurotoxique). Fiers hérauts de la parole citoyenne greusotine, nous osons braver la bien-pensance ambiante pour l’écrire.
(1) La rédaction du Greusot-Infos profite de cette tribune pour leur adresser un message personnel : messieurs de l’équipe des ripeurs du mardi, nous vous avons laissé une vieux fauteuil de bureau à côté de notre bac jaune. Nous n’en avons plus l’usage et le levier du dossier est cassé. Merci par avance de faire le nécessaire !